
Moi, il y avait déjà bien longtemps que je savais ça, tout au fond de moi. Que je n’étais que ça, un vide couilles, un sac à bites, une paillasse uniquement vouée au plaisir des hommes. Je le savais depuis mes treize ans.
Inconsciemment d’abord, puis au fil du temps, c’était devenu de plus en plus évident, à force de me soumettre docilement au désir de tous les types qui avaient croisé mon existence, Rachid en particulier. Alors je ne craignais pas d’être insultée, rabaissée une fois de plus, je n’avais déjà plus rien à perdre de ce côté-là. Mon amour propre, il y a bien longtemps que je l’avais ravalé. Non, ce que je craignais, c’était l’assaut d’une meute de mâles excités, leur violence peut-être. Je ne savais pas si je serais capable de tout subir pendant vingt-quatre heures d’affilée…
Djamila m’avait parlé souvent de ses deux « stages ». Elle m’avait prévenu que c’était un

véritable viol organisé, voulu pour la briser, pour faire en sorte qu’elle ne puisse plus rien refuser par la suite. La première fois, ça avait été terrible. Elle s’était rebellée, débattue. Ça les avait encore plus excités et ils l’avaient défoncée avec encore plus d’énergie, encore plus longtemps, humiliée, fouettée, jusqu’à ce qu’elle accepte son sort. Elle n’avait plus jamais tenu tête à son mac. Et quand, plus tard, Blacky lui avait signifié qu’il la remettait de nouveau en stage, juste pour tester sa docilité, elle avait accepté sans protester. Cette fois-là, elle s’était contentée d’obéir et de subir stoïquement jusqu’à ce qu’ils décident que c’était suffisant.

Moi, depuis que j’avais connu Djamila et son black, je savais que mon tour viendrait. J’avais eu le temps d’y penser, d’imaginer ce qui m’attendait. J’avais envisagé l’éventualité d’y échapper. C’était facile après tout. Il suffisait de partir et d’échapper à l’emprise de Blacky. Mais je crois qu’au fond de moi je n’avais pas réellement pensé une seconde me dérober. Je savais que c’était mon sort. Je l’acceptais avec fatalisme et curiosité…
Vos réflexions